samedi 5 avril 2025

Toby Hounsham : " Jouer avec les Stranglers c'est déjà très bien mais faire un album et avoir mon nom dessus serait incroyable !"

L'attente a été longue ! Mais il nous fallu du temps pour traduire la longue interview de Toby. Nous le remercions à nouveau pour sa gentillesse et sa disponibilité (et également pour les photos).

Bonne lecture et à bientôt avec quelques nouvelles idées ...assez originales.

 
Bonjour Toby ! Un grand merci d’avoir accepté de nous consacrer un peu de ton temps. Nous sommes, au sein du blog français des Stranglers, très heureux de t’accueillir le temps de cette interview. Désormais les fans te connaissent comme le successeur de Dave mais finalement, nous ne te connaissons peu. Pour commencer, parle nous un peu de toi : qui est Toby Hounsham ?
Toby Hounsham ? Mais c'est moi ! (Rires) Question intéressante. La musique fait partie de toute ma vie. J'ai grandi en jouant du piano à partir d'un très jeune âge. Mon père était pianiste de boogie woogie, et il y avait toujours de la musique à la maison. J’étais toujours entouré par de la musique ou par des musiciens.  Mais il y a deux choses qui caractérisent vraiment Toby Hounsham : la musique et les voitures ! 
Je suis un accro aux voitures de sport !! Aujourd'hui, je conduis une Fiat Abarth 595 Competizione, toute jaune ! Les Stranglers se moquent de ma voiture et la surnomme Thunderbird 4 (d'après la série TV) parce qu'elle est vraiment jaune. 
 
Ou es-tu né ?   
Dans un petit village à Clevedon dans le Somerset et pas loin de Bristol. C'est un superbe village de type victorien.
 
Tu as grandi à la campagne ? 
Oui mais maintenant c'est devenu une ville. Pour le travail de mes parents nous avons dû quitté Clevedon pour Londres.
 
Tu connais notre pays à  travers les concerts du groupe, portes tu une attention toute particulière à la France ?
Mon frère a vécu en France dans la région de Cognac et il y est resté huit ans. J'apprécie beaucoup vos chanteurs et vos chanteuses comme Gainsbourg et Françoise Hardy. Récemment nous avons joué dans un festival en France, et il y avait un groupe français La Femme. J'ai vraiment aimé leur musique, ils ont une chanson qui s'appelle "paradigme " qui est fantastique.
Évidemment je ne comprends pas toutes les paroles, mais la langue française, pour moi, c'est comme de la musique ou plutôt comme un instrument de musique. Gainsbourg, Hardy, quand ils chantent, c'est très musical à l'oreille. Le mot « maintenant » est un mot très musical, très simple et qui sonne bien. C'est aussi un mot très expressif.
La France est un des plus beaux pays au monde. J’ai eu la chance de beaucoup jouer en France Vous avez une belle langue, et j'adore entendre les gens parler français ! JJ me dit toujours que les Français ont une obligation de se rebeller contre l'autorité ! Sinon c'est la guillotine ! (Rires).
 
Comment as-tu appris les claviers ? As-tu fait une école de musique ?
J'ai appris très jeune avec mon père qui était pianiste de boogie woogie, l'ancêtre du rock n roll. Après j'ai pris quelques leçons avec un professeur. 
Le pianiste de boogie woogie fait la basse, la batterie et la mélodie. Et pour être honnête, pour jouer les morceaux de Dave Greenfield qui sont des morceaux très compliqués, le boogie woogie m'a aidé énormément. J'ai joué du piano jusqu'à mes 15 - 16 ans. J'étais naturellement bon.
 
Comment es-tu devenu le clavier de Rialto?
J'ai répondu à une petite annonce dans le magazine de musique, le Melody Maker. C'est aussi comme ça qu’avait été recruté Dave Greenfield. Avec un ami qui était batteur et qui avait vu  la petite annonce, nous avons vu  qu'un groupe recherchait  un batteur et un claviériste. Il m'a demandé de venir avec lui au studio de Camden, à Londres. Nous étions en 95/96. J’ai eu le job mais pas mon ami batteur. Et après on m'a fait revenir mais sans jamais me dire que j’étais réellement embauché. En tout cas, jamais officiellement ! J'ai eu beaucoup de chance d'être pris.
Avec deux disques et un tube sorti en 1997, Rialto a eu beaucoup de succès en Angleterre. Malgré le succès, le groupe s'est séparé assez rapidement.
 
Est-ce que tu le regrettes ? La maison de disque n’a pas assuré ? Elle vous a laissé tomber ?
Oui c'est vrai on s'est fait avoir par la maison de disque. On a été pris entre deux feux, à savoir  entre la direction de la maison de disque et le management de East West Records. A la maison mère Warner Records, un nouveau directeur est arrivé et ce dernier a changé la politique de la maison de disque. A partir de ce moment-là, nous avons été virés.
Ce n'était pas une question ou un problème commercial car nous avions beaucoup de succès. C'était juste une question de politique. Nous avions le single "Untouchable " dans le top 20 en Grande-Bretagne et nous sommes apparus dans le fameux « Top of the Pops ». A l'époque, le plus grand show musical pour la Tv. On faisait aussi beaucoup de passages télé et quand l'album est sorti, on avait vraiment le vent en poupe. Il y avait beaucoup d'argent en jeu et c'est devenu vraiment « la folie » ! Le groupe grandissait mais nous n’étions pas assez grand pour survivre ! Après nous avons été sur un label indépendant dont je ne me rappelle plus du nom. Notre dernière tournée s’est déroulée en 2000, on faisait alors la première partie de Duran Duran à Wembley. Mais il n’y avait plus beaucoup d'argent pour que nous puissions continuer et le reste du groupe voulait s’orienter davantage vers la musique électronique. Alors que pour moi, quand je suis arrivé dans Rialto, j’aimais plus la musique inspirée de John Barry ou Ennio Morricone. Un son aussi beaucoup plus romantique et donc forcément on s'est séparé. Le reste du groupe a survécu pendant deux ans mais pour finir je n’ai vraiment eu que de très bons souvenirs avec eux.
Nous avons été pris dans la vague brit pop et je suis très content d'en avoir fait partie. Mais à cause d’une décision malheureuse, l’aventure s'est terminée comme ça. Et en plus la maison de disque nous a interdit de communiquer sur la fin du groupe… 

Comment peux-tu nous expliquer l’immense succès de Rialto en Asie surtout en Corée du Sud vers 1998?
C'était un peu par accident car à l'époque il y avait beaucoup de piratage et malgré ça Rialto a bien vendu son deuxième album.  Nous avons tourné en Corée pendant deux semaines et je me souviens d'une conférence de presse où nous avions été reçus comme les Beatles ! Les micros étaient posés avec nos noms dessus, tous les médias du pays étaient là et c'était complètement dingue ! Une très bonne expérience même si je reste toujours persuadé que c'était par accident. Quelqu'un en Corée a dû tomber sur un de nos disques et l’a fait écouter à des copains et c'est comme ça que c'est parti !  En Corée c'est vrai qu'on était énorme. Parfois il y a des pays où on ne sait pas pourquoi mais ça marche.

Le titre ‘Untouchable » ressemble à un morceau de Pulp. Romantique et très élégant, ce single met tes parties de claviers en évidence. Il y avait une connexion entre vous et les autres groupes de cette époque ?
Jarvis Cocker le chanteur de Pulp faisait le DJ à certains de nos concerts et il était très ami avec Louis notre chanteur.
Dans notre premier album, il y avait beaucoup de guitares et d'instruments à cordes dans un esprit très John Barry, très Morricone. Mes morceaux préférés sont dedans. Le son de la guitare de Johnny était vraiment très western spaghetti. De mon côté, je n’ai jamais crée quoi que ce soit pour Rialto. C'était surtout Louis et Eddy qui écrivaient les chansons. Johnny le guitariste les produisait et tout était pratiquement écrit quand j'arrivais. Je ne peux pas vraiment dire que c'est grâce à moi si Rialto a eu du succès ! Mais cela reste une expérience extraordinaire.

Est-ce que David Bowie et Roxy Music ont compté pour toi ?

Bowie ?  Oui définitivement. Dans Rialto, Louis était très fan de Roxy Music. Ça se voit surtout dans notre façon de nous habiller, avec des costumes « dandy » comme Roxy Music. Sinon, nous avons fait une face B avec une reprise de Bowie. Je l'ai vu en concert avec Tin machine à Milton keys. C’était bien pour moi parce que j'ai pu voir David Bowie avec un groupe qui commercialement n'était pas énorme. C'était vraiment bien car Bowie en a profité pour jouer tous ses grands succès. Il était tout simplement génial et tout le monde doit être probablement d'accord là-dessus.

Es-tu toujours ami avec Eliott, le chanteur de Rialto ? As-tu gardé un lien ?
Oui mais nous nous sommes perdus de vue pendant un petit moment. On s'est reparlé il y a deux ans seulement quand il a sorti un nouvel album. Il était en concert avec son groupe mais moi j'étais déjà occupé à plein temps avec les Stranglers. Je ne pouvais plus revenir avec Rialto. C'était très agréable de se revoir car c'est quelqu'un que j'aime beaucoup. C’est un très grand musicien, talentueux et avec le talent qu'il a, il devrait être plus connu. C’est quelqu'un de très bien, de très droit. Son nouvel album sort en avril. Mais moi j'ai vraiment trop de travail avec les Stranglers pour suivre tout cela.
 
Et maintenant parlons de l'autre groupe dans lequel tu joues :  Mungo Jerry !   
Ah oui je peux vous en parler car l'industrie de la musique est vraiment très drôle. C’est un peu comme un puzzle, toutes les pièces s'emboîtent les unes dans les autres toutes seules ! J'étais en concert avec un autre groupe et nous jouions alors dans un festival. Nous partagions la même scène que Mungo Jerry. On jouait le même soir, c'était dans les années 2000-2001. Après le concert, nous avons bu un verre. C'était à Antwerp en Belgique. Puis nous avons échangé nos numéros et j'ai reçu un coup de téléphone quelques jours plus tard pour savoir si je voulais jouer avec eux. J’ai dit oui et j'ai joué avec Mungo Jerry pendant vingt ans !
Mungo est un grand fan des Doors, c'est un pur bluesman. Il improvise comme il veut ! Nous écoutions pratiquement les mêmes musiques. Il a toujours plein de projets, toujours en mode création. Il est connu évidemment pour avoir écrit « in the summertime » mais c'est un musicien de blues extraordinaire. Il a écrit de très bons albums mais il ne fait malheureusement plus beaucoup de concerts. En Allemagne c'est une vraie star ! J’ai d'excellents souvenirs de concerts avec lui.
Ray ne joue plus avec les membres originaux de Mungo Jerry. Ray Dorset est vraiment l’atout principal de Mungo Jerry et nous avons joué ensemble jusqu'à l'arrivée du covid.

Tu étais un grand fan des Stranglers. Peux-tu nous dire comment tu les as découvert ?
J'étais encore à l'école, je devais avoir entre 13 et 14 ans. J'étais avec un ami et nous faisions une marche pour une organisation caritative. Cet ami avait un Walkman Sony à cassette et sur une cassette il y avait les morceaux « Nice and sleasy » et « Something better change ». Je m'en souviens encore aujourd’hui ! j'ai d'abord écouté le morceau « Something better change » et j'ai fait waouh !! Je suis devenu accro pratiquement de suite en écoutant ce morceau. Mon frère aîné avait aussi un album « No More heroes ».
J'ai retrouvé une vieille cassette quand je jouais avec l'un de mes premiers groupes. Je devais avoir 16 ans et quand j'écoute la musique que l'on faisait je me dis mais j'ai tout piqué à Dave Greenfield ! Je crois que le morceau que je jouais s’appelait « Wasting time ». Le solo que je devais jouer était complètement pompé sur « Walk on by » ! J'ai simulé, imité le jeu de Dave. J'ai absorbé sa façon de jouer mais j'adorais aussi le son de la basse de Jean-Jacques, la batterie quasi mécanique de Jet Black, la guitare énervée de Cornwell. Mais le son et la façon de jouer de Dave Greenfield ont été le déclic pour moi. Il n’y a que deux joueurs de synthé  et de clavier pour moi dans le monde, c'est Ray Manzarek des Doors et Dave Greenfield des Stranglers.
Le plus drôle c'est que Dave Greenfield n'était pas influencé par Ray Mazarek puisqu'il n'écoutait pas les Doors ! Il écoutait plutôt du prog rock. Dave écoutait Rick Wakeman, Deep purple. Les gens font souvent la comparaison entre Greenfield et Manzarek mais leurs rôles au sein de leurs propres groupes n'étaient pas du tout le même. Il y a un titre des Doors qui me rappelle vraiment Dave, c’est « Hyacinth house ». Je ne vais pas me faire des amis mais Dave pouvait jouer dix fois plus vite que Ray Manzarek. 

Les Stranglers avaient une réputation de dur à cuire à leurs débuts. Ils étaient plus vieux que les autres groupes de la scène punk, universitaires pour Hugh et JJ et surtout ils maîtrisaient leurs instruments. Quels sont tes souvenirs de cette époque et de leur mauvaise réputation jusqu'au début des années 80 ?
Oui bien sûr ! Quand j'ai découvert les Stranglers, c'était donc au milieu des années 80, ils étaient quand même plus doux qu’au début ! Je me rappelle cette époque avec l'album « Dreamtime ». Je pense que les Stranglers n'étaient pas un groupe punk. Les Stranglers se battaient contre tout le monde. Ils étaient vus comme pas très cool. Beaucoup d'hostilités contre eux et ils devaient se battre contre le système. C'était très dur au début pour eux car ils n'avaient pas beaucoup d'argent. C'était tellement dur au début que Jean-Jacques m'a dit qu'il récupérait, pour pouvoir manger, des tomates à la station d'épuration du coin.

Comment as-tu obtenu le job avec les Stranglers ? Étais-tu sur une liste ? Connaissais-tu déjà JJ à l'époque ?
Comme je disais à propos de Mungo Jerry, encore un autre puzzle ou toutes les pièces se sont emboîtées toute seules ! Un bon ami de Jean-Jacques travaillait pour une maison de disque et il savait que j’étais fan des Stranglers. Il m'a présenté à Jean-Jacques et j'ai fait des maquettes pour lui car il travaillait sur un projet Mais je ne me souviens plus lequel. Il savait que je jouais bien et que « mon son » était le même que celui de Dave Greenfield. Louis Nicastro  me connaissait aussi un petit peu car il jouait également du clavier. Louis m'avait aidé à l'époque quand j’avais un petit groupe, c'était aux alentours des années 2000. On enregistrait des maquettes en studio. Jean-Jacques cherchait un clavier. Donc nous nous connaissions tous un petit peu. Quelques temps après le décès de Dave, j'ai reçu un coup de téléphone. Puis j’ai été pris dans les Stranglers. Je pense que c’était le destin

Avais-tu déjà rencontré David Greenfield, le connaissais tu ?
Oui je l'avais déjà rencontré plusieurs fois.  Je l'ai rencontré au début des années 90 quand ils enregistraient un album dans le Surrey. Un ami à moi m'a dit que les Stranglers enregistraient dans ce studio. J’y suis allé et j'ai quelques photos pas vraiment terribles ! 

Jean-Jacques me dit que je ressemblais à Jacob Rees - Mogg (député conservateur)! Mais j’ai surtout une histoire incroyable avec Dave. Je crois que c'était lors d'une tournée en 1999 où notre tour manager était aussi guitariste et roadie pour les Stranglers. Nous avions été invités à une petite fête après l'un de leurs concerts. Rialto venait de se faire virer par « EastWest » et ce soir-là j'ai beaucoup discuté avec Dave. J'avais perdu toutes mes illusions artistiques, mais Dave était quelqu'un de remarquablement intelligent. Il connaissait très bien le business de la musique. 
Il m'a alors donné une serviette en papier qui l'a signé et que j’ai retrouvé récemment. Il a écrit dessus ""n'abandonne jamais les claviers"" signé Dave Greenfield. Je vais l'encadrer chez moi parce que je suis vraiment content de l'avoir retrouvé. Je vais l’accrocher au mur de la maison car pour moi c'est comme une prophétie !
 
Utilises-tu  les mêmes claviers que Dave Greenfield ou as-tu apporté des changements ?
Je dirais les deux parce que quand j'ai rejoint les Stranglers au début on a gardé les mêmes claviers que Dave. Car c'était trop compliqué de tout changer. C'est seulement maintenant que nous sommes en train de tout changer. Je voulais le faire il y a quelques temps déjà mais c'est un gros changement parce qu'il faut tout voir avec l'ingénieur du son. C'est ce que je suis en train de faire en ce moment et je peux même vous dire que les nouveaux claviers arriveront après la tournée australienne et nouvelle-zélandaise. Pratiquement tout le matériel sera ainsi changé.
D’ailleurs, je ne sais pas si vous l’avez remarqué mais pendant la tournée du 50e anniversaire je n'avais pas les mêmes claviers. C’était arrangé autrement car Dave posait les claviers sur scène en forme de A. Et moi je préfère les disposer comme une colonne. Mais il y a le même nombre de claviers que Dave :  trois claviers devant lui et un sur sa droite. A l’époque, un orgue Hammond, (2 claviers en un) un Honer cimbalet (celui de No more heroes ) et un minimoog . Puis, plus tard Dave a utilisé un Oberheim OB-xa. Dave avait toujours ce type de claviers sur scène. C'était sa marque de fabrique.
Moi ce que j'ai changé c'est ce qui « fabrique » le son, toujours avec un « ROLAND phantom XR » et un NOVATION A station qui est « le cerveau du  son ». Les claviers que j'ai sur scène ne font pas leur propre son c'est grâce au « cerveau » que je peux sortir des sons. Il faut les connecter pour avoir un son le plus proche de celui de Dave. J’ai aussi une tablette midi patch mais c'était aussi prévu pour Dave. Et j'ai mon iPad avec des petites notes pour me rappeler des choses pendant le concert pour pas oublier quoi que ce soit.

Tu as apporté une nouvelle dimension sur scène avec moins d'équipement, un kit plus léger par rapport à celui de Dave. Le public peut te voir jouer, souhaites-tu continuer sur cette voie ?
Je n'aime pas vraiment parler de cela mais je sais que les gens peuvent me voir danser ! Comme mon « père Dave » ne bougeait pas trop... Mais moi je ne peux pas me contrôler ça car j’aime bouger. Mais je ne suis pas un danseur professionnel ! Je sais que parfois les fans font des commentaires sur ma façon de danser !!

C'est vrai que le public te voit mieux ! Avec Dave on ne voyait que sa tête et le rat !
Pendant les répétitions j'ai aussi le rat ! Mais je ne le prends pas sur scène parce que pour moi c'était l’une des marques de fabrique de Dave. C'est une chose de jouer sa musique mais Dave c'était Dave et moi c'est moi !
 
Les morceaux des Stranglers sont très structurés, très précis dans leur construction comme dans leur exécution. Sur scène est-il possible d'apporter un peu de soi sur des séquences souvent programmées ou des sonorités type qui sont difficiles de modifier ?
Pas vraiment, Jean-Jacques me dit parfois que les chansons du groupe sont comme des pièces d’un puzzle qui doivent s'emboîter parfaitement. J’ai un exemple : le solo de clavier sur « Hanging around », j'ai essayé d'être le plus proche possible de celui de Dave. Mais c'est impossible d'y être à 100 %. Nous sommes tous des musiciens différents et Dave avait un style vraiment à lui. J’arrive à simuler un peu sa façon de jouer car j'ai beaucoup appris de lui quand j'étais jeune. Mais nous sommes inévitablement différents et je suis sûr que quelques fans ont pu remarquer que je ne joue pas comme lui. Mais j'essaie malgré tout de jouer comme lui !
Quand je jouais avec Mango Jerry c'était différent car il y avait beaucoup d'improvisation alors qu’ avec les Stranglers je me concentre beaucoup pour jouer à la façon des Stranglers. Je n'y arrive pas toujours à 100 %.
Dave Greenfield faisait des bourdes parfois , c'etait vrai sur la fin. Mais c'etait sûrement dû comme tout le monde à l'âge et à l'arthrite.
Moi j'ai toujours essayé de jouer comme Dave quand il était à son meilleur niveau. Mais parfois il y a des morceaux qui sont extrêmement dur à jouer. Des morceaux comme «Toiler » où les rifs sont tellement rapides !  Comme sur beaucoup de morceaux de l'album Black and White tank,  par exemple « Sweden ». Et parfois des morceaux qui semblent simples sont aussi très compliqué à jouer. Jouer des morceaux sur deux claviers différents c'est très compliqué et j'ai réalisé que Dave utilisait sa main gauche pour avoir un son de corde par exemple et un son de piano avec la main droite. Et c'est extrêmement difficile à faire, « Golden brown » on est le parfait exemple :  la mélodie avec la main droite et le clavecin avec la main gauche.
C'est comme avec Jet Black, c'était pas le plus flashy des batteurs mais par contre c'était une vraie machine tellement il était solide.
 
Les titres des Stranglers s'exécutent sur scène comme un véritable kata de karaté. Les enchaînements sont précis et il y a peu de place à l'improvisation. Aimerais-tu pouvoir sortir un peu du cadre parfois?
On ne peut pas improviser sur les morceaux des Stranglers. Ce n'est pas possible ou peut-être sur le solo de « Walk on by ». Parfois il m'arrive de dévier un petit peu mais pas souvent. Tous les morceaux les plus connus comme « Hanging around » ou  « No More Heroes » doivent être joués à la perfection  et donc l'improvisation n'est pas possible.

Quels sont les morceaux du groupe les plus délicats à jouer ?

Dave me disait que c'était « Toiler », il trouvait que c'était un morceau très difficile à jouer et il a raison. « Sweden aussi est difficile car il y a un solo qui est très long et j'essaie de le jouer comme sur l'album. Mais savez-vous laquelle je trouve la plus dure à jouer ? « Midnight summer dream » !! Mon cauchemar comme j'aime l'appeler !!
Dave aussi, avait du mal à la jouer car c'est en fa diese majeur. La chanson entière est comme un solo de clavier et donc c’est impossible de se cacher !  Nous l'avons joué sur quelques concerts en France et je l'ai foiré une ou deux fois ! Ce n'est pas que je ne veux pas la jouer mais je la prends vraiment comme un challenge car je veux la jouer parfaitement.

Nous t'avons vu jouer pour la première fois et c'était en France, à Nantes. C'est vrai que tu étais très concentré sur ce que tu faisais.
(Toby rires ) C'était même mon premier concert tout court avec les Stranglers !!
 
Ton ou tes morceaux préférés dans le répertoire ?
Ma préférée c'est « Golden brown », j'adore cette chanson. D'ailleurs hier nous étions en répétition pour la tournée australienne et quand je joue « Golden brown » j'ai toujours les poils qui se hérissent j'aime aussi « Hanging around » j'aime quand il y a de l'interaction entre mes claviers et la guitare. J’aime aussi « Strange little girl » car j’adore la mélodie. En fait je sais pas par où commencer mais si on m'en demandait qu'une, ce serait « Golden brown ».

J’aime beaucoup l'album « Feline », et toi comme tu joues les claviers, j’imagine que tu dois aimer cet album aussi ?
Je suis d'accord avec toi Stéphane « Féline » est un album très fort. Il est encore plus apprécié avec le temps qui passe. Les guitares acoustiques, les synthés, la batterie de Jet qui a le son d'une machine…. Mais c'était bien Jet qui jouait avec des fûts électroniques.
Mais pour te répondre, je n'ai pas d’angoisse pour jouer cet album. J’aime jouer par exemple « European female », « Ship that pass in the night », j'aime jouer ces deux morceaux mais nous avons aussi tous nos morceaux cauchemardesques à jouer !  Je crois même que pour Baz c'est « Don't bring harry ». Il fait un blocage sur cette chanson !
Moi, j’aime jouer « the Raven », « « the MeninBlack ». Dave maîtrisait vraiment tout sur « the Raven ». Il y a aussi « Duchess », « Sha sha à gogo » que j’aime également.

Et « Genetix » ? tu l'as chanté « Genetix » récemment.
Nous l'avons encore répété cette semaine ! Mais tu sais quoi ? Si j'avais vraiment commencé à trop réfléchir comment chanter sur « « Genetix », ça m'aurait rendu très nerveux. Mais je ne me suis pas posé trop de questions !  Jean-Jacques voulait que je la fasse et j'ai répondu d'accord. Je fais du mieux que je peux car le solo de clavier est assez dur à faire. Mais je ne voulais pas l’imiter parce qu'il avait vraiment une voix assez reconnaissable. D'ailleurs Jean-Jacques la comparait avec celle du Comte Dracula !! « Peasant in the big shitty » en est le parfait exemple. J'ai chanté « Genetix » comme je sais la chanter et n'oubliez pas que j'étais aussi et surtout un jeune fan des Stranglers ! J'adore aussi la basse de Jean Jacques sur « Genetix ». 

Tu l’as chanté à la perfection !
Merci ! Je suis tellement reconnaissant aux fans car ils auraient pu me détester pour avoir pris la place de Dave. Mais ce n’a pas été le cas.
Je sais que de nombreux fans ont quitté les Stranglers quand Cornwell est parti. Mais le groupe a continué et maintenant je m'aperçois que Baz fait partie du groupe depuis 25 ans. Le soutien du public a également rendu mon travail beaucoup plus facile. 

Est-ce que tu as travaillé spécialement ta voix pour chanter sur « Genetix » ?
Non, j'ai juste chanté comme je le sentais. Et je suis content de pas avoir reçu des canettes de bière !! (Rires)

La dernière contribution de Dave s’est faite sur « Dark matters ». Jean-Jacques et Baz sont les principaux auteurs de ce disque, qu'aimerais-tu apporter sur le prochain album ?
Ça serait vraiment la cerise sur le gâteau ! Jouer avec les Stranglers c'est déjà très bien mais faire un album et avoir mon nom dessus serait incroyable !  C'est déjà un rêve mais là ce serait le top ! J’écris et je compose un petit peu mais je n'ai rien sorti pour l'instant. Je partage mes idées avec Baz et Jean-Jacques. Il y a une envie de sortir un nouvel album et je serai vraiment content de pouvoir y participer.

Peut-être un nouvel album pour l'année prochaine ?
Je n'en sais rien pour l'instant mais je sais que Jean-Jacques en a parlé publiquement et qu'il a quelques idées en tête. Mais quand je n'en ai aucune idée. La « logistique » est compliquée car Jean-Jacques vit dans le sud de la France. Mais ce serait quelque chose d'énorme de faire un nouvel album si rapidement. Car pour l'album « Dark matters » il a fallu patienter neuf ans ! J'aimerais donc vous dire que cela va se faire mais nous verrons. Je ne révélerais rien pour l'instant car je pourrais prendre un coup de karaté de jean Jacques ! (Rires)
 
Aurais-tu quelques mots pour les fans des Stranglers du French blog ?
Oui bien sûr ! Déjà merci pour le soutien que vous m'apportez, la France est devenue un endroit où j'adore jouer. Et le fait que Jean-Jacques soit français renforce nos liens avec la France. Les Stranglers sont devenus très populaires avec les albums Féline, Aural sculpture etc Les fans français sont plus cérébraux et intellectuels par rapport à la Grande-Bretagne. Là-bas ils préfèrent les Stranglers quand ils sont durs, comme au début. Jouer en France est un vrai plaisir car les artistes sont reconnus et traités avec respect. En Grande-Bretagne, on te demande encore quel est ton vrai métier !!
Il y a vraiment une différence d'attitude envers les artistes entre la Grande-Bretagne et la France. Un exemple : après la balance il y a souvent un repas et il y a tous les techniciens, les éclairagistes, les roadies et le personnel administratif. Enfin tout le monde et tout le monde mange en même temps dans la même salle et c'est toujours de la bonne nourriture et des bons vins ! La France c'est ma deuxième maison !!

Merci Toby !
 
 
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- Traduction: David Julien.
- Photos: Toby Hounsham

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